Home 2018 mai 06 Lectures hebdomadaires – accepter l’état présent

Lectures hebdomadaires – accepter l’état présent

John Main o.s.b., “Growing in God”, The Way of Unknowing, New York, Crossroad, 1990, p. 79-81.

Quelle est la différence entre la réalité et l’irréalité ? Je pense qu’une manière de la comprendre est de concevoir l’irréalité comme le produit du désir. Or, la méditation nous apprend, entre autres choses, à abandonner le désir, et nous l’apprenons parce que nous savons que nous sommes invités à vivre pleinement le moment présent. La réalité exige immobilité et silence. C’est l’engagement que nous prenons en méditant. Comme tout le monde peut le constater d’expérience, nous apprenons dans le silence et l’immobilité à nous accepter tels que nous sommes. Cela paraît très étrange aux hommes de notre temps, surtout aux chrétiens d’aujourd’hui incités par leur éducation à faire tant d’efforts inquiets.

La vraie tragédie de notre temps est que nous sommes tellement remplis de désirs – de bonheur, de réussite, de richesse, de pouvoir, et de tout ce que l’on voudra – que nous sommes toujours en train de nous imaginer tels que nous devrions être. C’est pourquoi il est si rare d’arriver à se connaître tel que l’on est et d’accepter son état présent. Or, la sagesse traditionnelle nous dit : sache que tu es, et que tu es tel que tu es. Il se peut que nous soyons des pécheurs et si nous le sommes, il est important que nous le sachions. Mais il est beaucoup plus important pour nous de connaître, par notre propre expérience, que Dieu est le fondement de notre être et que nous sommes enracinés et établis en Lui. Telle est la stabilité dont nous avons tous besoin ; nous n’avons pas besoin de l’effort et du mouvement du désir, mais de la stabilité et de l’immobilité de l’enracinement spirituel. Chacun d’entre nous est invité à apprendre dans sa méditation, dans son repos en Dieu, qu’en Lui nous avons tout ce qui est nécessaire.

 

Après la méditation

 

 

Mary Oliver, “The Country of Trees” [Au pays des arbres], Blue Horses: Poems, New York: Penguin, 2014, pp. 77-78.

Il n’y a pas de roi dans leur pays
il n’y a pas de reine
il n’y a pas de princes en lice pour le pouvoir,
inventant la corruption.
Tout comme chez nous, beaucoup d’enfants naissent.
Certains vivront et certains mourront
et le pays continuera.

Le temps qu’il fait sera toujours important.

Et il y aura toujours de la place pour les fleurs fragiles, les violettes et les sanguinaires.
Quand il fait froid, on leur donnera des couvertures de feuilles.
Quand il fait chaud, elles auront de l’ombre.
Ce n’est pas par culpabilité, ni une résolution de fin d’année,
mais peut-être pour se réjouir de leurs couleurs,
de leurs petits visages de fleur.

Ils ne sont pas comme nous.

Certains périront pour devenir des maisons ou des granges,
des clôtures et des ponts.
D’autres survivront au nombre des années.
Et jamais personne ne prononcera un seul mot de plainte,
comme si les langues, après tout,
n’étaient pas assez évoluées, n’étaient qu’une première étape.
Ils ne posent jamais de questions aux dieux :
lequel est le vrai, et quel est leur dessein.
Comme si on leur avait déjà tout dit
et qu’ils étaient contents.