Home 2016 octobre 23 Lectures hebdomadaires – Le silence

Lectures hebdomadaires – Le silence

Laurence Freeman, osb, Bulletin trimestriel, vol. 33 n° 3, septembre 2009.

Apprendre à être silencieux implique de détacher l’attention de soi, au moins de la façon dont nous le faisons ordinairement en pensant compulsivement à nous-mêmes, en regardant en arrière ou en fixant l’horizon. Que devrais-je faire ? Comment être plus heureux ? Ai-je réussi ou échoué dans la vie ? Qu’est-ce que les gens pensent de moi ? Est-ce que je maîtrise la situation ?

Habituellement, ces questions déterminent nos décisions et nos modèles de croissance ou de déclin. Chacune de ces questions est posée par un moi qui s’objective, lequel, naturellement, a un rôle nécessaire et pragmatique à jouer… Mais très vite, ces questions peuvent devenir la tournure d’esprit dominante qui préside en permanence à notre existence. Nous devenons leurs esclaves. Le regard sur soi (l’ego tel une caméra de surveillance qui enregistre en continu le moindre mot et le moindre geste) et le regard des autres sur nous (le sentiment d’être évalué et trouvé déficient) ont, avec l’aide des médias, donné naissance à une obsession culturelle de l’image de soi. Si rien ne s’y oppose ou ne la modifie, elle détruit la confiance du vrai soi qui permet de prendre des risques et de se donner, autrement dit, de vivre. […]

Lors d’une visite en Norvège, … je me suis baigné dans un fjord d’Oslo par une splendide journée. Comme je n’aime pas l’eau froide, je l’ai tâtée du bout des pieds et l’ai trouvée trop froide à mon goût. Mais rendu honteux par la hardiesse toute viking de mon compagnon qui avait déjà plongé, je me raidis et plongeai à mon tour. Le froid fit éclater mon esprit, une agonie momentanée, mais ensuite, tandis que je nageai et que mon corps réglait sa température, l’eau devint délicieuse.

Nous avons tous peur de plonger. Nous trouvons des excuses pour éviter de rester assis, immobiles, et nous fuyons la venue du silence. Mais lorsque nous devenons vraiment silencieux, la vie s’ouvre dans une explosion d’une fraîcheur et d’une intensité qui sont l’énergie de la vie du Christ. Immédiatement, les craintes, les préjugés et les prisons construites par nos soins commencent à s’écrouler. On peut dire, comme Jésus, que l’on entre dans la chambre intérieure. Mais dès qu’on entre dans cette pièce, on découvre que l’on évolue dans un espace infini.

 

Après la méditation

Mère Teresa, La prière, fraîcheur d’une source, Bayard Culture, 2003, Collection Spiritualité.

Nous avons tous besoin de trouver Dieu, mais il ne se laisse découvrir ni dans le bruit ni dans l’agitation… Plus nous recevons dans une prière silencieuse, plus nous pouvons donner dans notre vie active. Le silence nous donne un regard neuf sur toutes choses.

Nous avons besoin de ce silence afin de toucher les âmes. L’essentiel n’est pas dans ce que nous disons, mais dans ce que Dieu nous dit et dans ce qu’il transmet par notre intermédiaire. C’est en silence que toujours Jésus nous attend. Dans ce silence, il nous écoutera, c’est là qu’il parlera à nos âmes et c’est là que nous entendrons sa voix. Dans ce silence, nous trouverons une énergie nouvelle et une véritable unité. L’énergie de Dieu sera nôtre pour bien accomplir toutes choses dans l’unité de nos pensées avec les siennes, l’unité de nos prières avec les siennes, l’unité de nos actions avec les siennes, de notre vie avec la sienne.